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FOCUS

FCC-CACH : la confiance et la sincérité de nouveau mises à l’épreuve

Pour une confuse affaire de milices démantelées à Kinshasa et à Kasumbalesa, les membres de la coalition au pouvoir sont prêts à enflammer la case commune. La famille politique du président honoraire est montée au créneau pour, non pas exiger des enquêtes comme le préconisent la police et le gouvernement, mais ouvrir un procès contre sa «sœur-ennemie », l’Udps de Félix Tshisekedi. Entre les deux, l’amour, s’il en existe encore, est du bout des lèvres, du genre « je t’aime, moi non plus » ! Qui prendra le dessus sur l’autre dans ce marché de dupes conclu entre le FCC de Joseph Kabila et le CACH de Félix Tshisekedi qui semble prendre tout un peuple en otage ? Seul le temps rendra son verdict.

Qu’est-ce qui s’est exactement passé les mercredi 26 et jeudi 27 août à Kingabwa, dans la commune de Limete à Kinshasa ? La question demeure pendante, en attendant tout son éclairage auprès des services attitrés. Entretemps, c’est une situation assez confuse qui tend une fois de plus de mettre en mal la coalition gouvernementale FCC-CACH.

La réalité est qu’il y a eu des coups de feu les 26 et 27 août au quartier Kingabwa. Selon un témoin voisin du site, c’est depuis plusieurs mois que des jeunes gens, âgés de 20 et 35 ans, recrutés sont formés dans l’enceinte de la concession où habiterait un membre de la Maison civile du chef de l’État. Sur quoi est axée cette formation et quelle en était la finalité ? Rien n’est encore clair, même si le rapport de la police évoque une « milice ». Sa dénomination serait « Gardien de la paix volontariste de Fatshi » avec pour mission de protéger le pouvoir du chef de l’État.

Diabolisation ou pas d’un camp contre un autre, ce qui s’est passé au quartier Kingabwa, dans la commune de Limete, est loin d’être considéré comme un fait divers. Bien au contraire. Il s’agit, aux yeux de plus d’un observateur, d’une situation qui doit cristalliser l’attention des dirigeants du pays qui doivent répondre à cette problématique qui traduit déjà une nouvelle crise qui risque de mettre en péril la stabilité gouvernementale.

La preuve, c’est que du côté de la plateforme politique de l’ex-président Joseph Kabila, on dit craindre que « cette pratique ne conduise à un non-État ».

Dans un communiqué daté du 28 août, le Front commun pour le Congo (FCC) a réagi à l’information liée à l’existence, au quartier Kingabwa, à Kinshasa, d’une milice se revendiquant de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS).

Dans ce document, la plateforme politique de Joseph Kabila dit avoir suivi avec « grand étonnement » cette information.

De ce fait, « le FCC exige qu’une enquête minutieuse et approfondie soit menée, et que la justice militaire se saisisse, en procédure de flagrance, de ces cas graves d’atteintes à la paix et à la sécurité nationales afin d’en identifier les commanditaires, et de leur infliger les sanctions les plus sévères, conformément aux lois de la République », peut-on lire dans ce communiqué signé par Néhémie Mwilanya, coordonnateur de la plateforme chère à Joseph Kabila.

Le FCC fait aussi un parallélisme avec d’autres faits qui se sont déroulés à Kasumbalesa, dans la province du Haut-Katanga.

« En raison de la similitude observée entre les activités menées par ces groupes de hors-la-loi, identifiés également à Kasumbalesa, dans la province du Haut-Katanga, le FCC exprime sa vive préoccupation de voir ces milices urbaines se multiplier d’autant qu’elles portent directement atteinte à l’État de droit, à la démocratie et à la sécurité des biens et des personnes », écrit-il dans ce communiqué émanant de la conférence des présidents de la plateforme chère à l’ex-président Joseph Kabila.

Et dans une interview accordée à RFI, Marcelin Cishambo, un des caciques du FCC, a affirmé que « le président Félix Tshisekedi était au courant de la formation de cette milice encadrée à Kingabwa », avant d’ajouter que cette formation était assurée « par quelques éléments de la garde républicaine ».

Réponse du berger à la bergère

Côté UDPS, on dément tout soutien du parti à ce réseau criminel. Pointé du doigt, la réaction du parti présidentiel est aussi vive. Le secrétaire général de l’Udps, Augustin Kabuya, a balayé d’un revers de la main toutes ces allégationsn sans fondements. Et de manière directe, il a indiqué que « ceux qui réfléchissent de cette manière, leur place est au Centre neuropsycho-pathologique (CNPP) ».

L’affaire, selon lui, est une provocation de trop. « Nous étions dans l’Opposition, au moment où on pouvait penser à la création d’une branche armée, nous ne l’avons pas fait. Aujourd’hui où nous sommes au pouvoir et l’institution président de la République est animée par un membre de l’Udps, et on nous colle des bêtises ».

Dans la foulée, Augustin Kabuya révèle même que bien avant l’assaut de la police, Jean-Marc Kabund, président a.i. du parti présidentiel, avait fait son rapport auprès du chef de l’État par rapport à cette question. « Comment expliquer que l’Udps qui est citée dénonce cette affaire ?», s’interroge-t-il. Une interrogation qui soulève évidemment d’autres interrogations, notamment : depuis combien de temps ce recrutement a lieu ? Et à qui appartient réellement la concession abritant les jeunes gens recrutés ?

Augustin Kabuya a vite renvoyé la balle dans le camp du commissaire provincial de la police ville de Kinshasa, afin d’éclairer la lanterne de l’opinion, quand bien même ce dernier n’aurait pas décliné l’identité de 23 éléments de la bande arrêtée. « Jusqu’à quand les gens vont chercher à nous diaboliser, à ternir notre image et celle du chef de l’État », s’est encore interrogé Augustin Kabuya.

Dans un communiqué, publié tard dans la soirée du 27 août, la police de la ville de Kinshasa a annoncé « avoir démantelé, sur ordre de la haute hiérarchie, un groupe d’inciviques dont 23 personnes ont été arrêtées. Dans ce flou persistant, la police rassure que les enquêtes se poursuivent pour retrouver le reste de la bande et les commanditaires de cette entreprise séditieuse ».

Une affaire d’État

Et au cours de la 46ème réunion du Conseil des ministres présidé par le chef de l’État, la question a figuré au menu de la communication présidentielle.

Selon le porte-parole du gouvernement, « le chef de l’État a noté que depuis quelque temps, l’on observe un phénomène inhabituel qui met en exergue quelques individus qui, sous couvert de leur appartenance réelle ou supposée à tel ou tel parti politique de l’actuelle coalition au pouvoir, s’adonnent à des activités illégales dans certaines villes du pays, notamment Bukavu, Lubumbashi, Kasumbalesa, Kinshasa et Matadi. Afin de mettre un terme à cette situation anarchique, le vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur a été chargé de prendre toutes les dispositions pour mettre ces inciviques hors d’état de nuire et de recommander fermement aux dirigeants de ces partis politiques de mieux tenir en laisse leurs militants. Le président de la République a insisté sur la nécessité d’appliquer la loi dans toute sa rigueur et pour tous ».

De cette affaire sécuritaire à Kingabwa, le FCC accuse et le CACH se défend sans attendre. Entre les deux camps, c’est la confiance et la sincérité déjà effritées qui volent totalement en éclats. La communication employée dans les deux camps illustre bien la situation confuse. Sans attendre l’issue des enquêtes, le communiqué du FCC désigne déjà le coupable, c’est l’Udps. Et du côté du coupable désigné, la réplique est loin d’être tendre : « …la place est au CNPP ».

Pour bien des observateurs, la sécurité du pays doit préoccuper tout le monde. Et à ce titre, aucun acte ne peut passer inaperçu. Autant que l’éclairage, tout l’éclairage d’ailleurs, doit être fait sur l’affaire du quartier Kingabwa, cela le doit également sur toutes les affaires sécuritaires, notamment, les miliciens Kamwina Nsapu avec les massacres qui s’en ont suivi au Kasaï, les miliciens Bakata-Katanga et Gédéon Kyungu dans la nature qui représentent encore une menace pour la paix, l’affaire de Yumbi, dans l’ex-Bandundu, le Bundu dia Kongo, etc.

Affaire à suivre.

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