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PROVINCES

Perceptions illégales sur les exportations agricoles au Nord-Kivu et en Ituri : l’ASSECCAF attend les mesures conservatoires du gouvernement

En conseil des ministres du vendredi 17 juin 2022, le président de la République, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo, a réitéré sa volonté de voir la revanche du sol sur le sous-sol se réaliser. A l’en croire, le secteur agricole est capital pour le développement de la RDC, dans la mesure où il constitue l’un des piliers dans la diversification de l’économie dont le pays a grandement besoin. Avant d’y parvenir, le chef de l’Etat a rappelé l’urgence d’assainir le climat des affaires en le rendant sain, exempt de toute tracasserie administrative et les respects stricts des lois dans ce secteur porteur de croissance. Ce rappel à l’ordre a été fait suite aux informations en sa possession faisant état d’une série des comportements arbitraires de la part de l’Office national des produits agricoles du Congo (ONAPAC) dans la perception des taxes sur l’exportation du café et du cacao dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, et ce, en violation des lois et règlementations en matière d’exportation des produits agricoles.

L’Association des exportateurs de cacao café et autres produits agricoles d’exportation de la RDC (ASSECCAF) salue donc les instructions données par le président de la République au gouvernement dans la 58ème réunion du conseil des ministres et espère que l’Exécutif national ne va pas tarder à prendre les mesures conservatoires qui s’imposent afin de permettre que la campagne caféière 2022 – 2023 et la grande saison de cacao qui commence en octobre 2022 se passent dans un climat des affaires apaisé entre l’ONAPAC, d’une part, et les exportateurs ainsi que les transitaires, d’autre part.

Face aux justifications et commentaires qui vont dans tous les sens après les décisions de la 58ème réunion du Conseil des ministres, l’Association des exportateurs de cacao café et autres produits agricoles d’exportation de la RDC (ASSECCAF) sort de sa réserve estimant que ses membres sont victimes sur le terrain de ces tracasseries.

Cette association sans but lucratif, réagissant à notre article publié à l’édition n°8354 du mardi 21 juin 2022 avec comme titre : « Nord-Kivu et Ituri, Exportation du café et du cacao : l’ONAPAC au-dessus de tout soupçon », appuie les mesures prises par le conseil des ministres et se propose de rappeler et clarifier brièvement les faits suivants :


• Le conflit entre l’ONC et les opérateurs économiques du secteur d’exportation des produits agricoles date depuis 2010 suite au double contrôle de la qualité de tous les produits agricoles d’exportation par l’Office congolais de contrôle (OCC) et l’Office national du café (ONC), l’actuel ONAPAC alors que le certificat de qualité (CQ) de l’ONAPAC et le certificat d’origine international (COI) de l’Organisation internationale du Café (OIC) délivrés par l’ONAPAC, sont requis uniquement dans le commerce international du café.

• A l’exportation, l’ONAPAC facture les produits agricoles d’exportation aux taux variant entre 4.5% et 2% de la valeur FOB des produits agricoles alors que, la loi n° 11/022 du 24 décembre 2011 portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture dispose à son article 73 que : « Les produits agricoles sont exonérés de droits et taxes à l’exportation. Les redevances et frais en rémunération des services rendus par les organismes publics intervenant aux postes frontaliers ne peuvent dépasser 0,25% de la valeur des produits exportés. Un arrêté du ministre ayant les finances dans ses attributions en détermine la répartition ».

Ainsi la loi impose un régime d’exonération des droits et taxes à l’exportation en vue de « Stimuler la production agricole par l’instauration d’un régime douanier et fiscal particulier (…) et de relancer les exportations des produits agricoles afin de générer des ressources importantes pour les investissements ».

De ce fait, toute autre perception des frais et redevances par les organismes publics, en dehors de ce plafond fixé par la loi, sur les produits agricoles à l’exportation, non seulement est illégale mais aussi amoindri la compétitivité des produits de la RDC sur le marché international et favorise la fraude de ces produits vers les pays limitrophes. C’est le cas de café, cacao et papaïne de la RDC.


• L’ONAPAC exige annuellement des frais d’agrément des exportateurs et des transitaires des produits agricoles d’exportation sans aucune base légale qui serait, dans le cas d’espèce, la mesure d’application du décret n° 18/044 du 24 novembre 2018 modifiant et complétant le décret n° 09/59 du 03 décembre 2009 fixant les statuts de l’Office national du café, en violation de l’article 3 de ce décret.

A ce sujet, il sied de rappeler que la loi particulière n°73/009 du 05 janvier 1973 portant sur le commerce en RDC stipule à son article 11 que « le Ministre ayant le commerce extérieur dans ses attributions règlemente le commerce d’importation, d’exportation et de transit ». Ce qui explique l’octroi du numéro import – export par le ministère du commerce extérieur et l’attribution au ministère du commerce extérieur le contrôle de qualité, de quantité, de valeur et de conformité des marchandises aux normes à l’exportation par l’ordonnance no 22/003 du 07 janvier 2022 fixant les attributions des ministères.

• Concernant le découragement des investisseurs, c’est plutôt l’ONAPAC qui les décourage en créant la peur en eux, en faisant bloquer les camions chargés de produits agricoles à l’exportation, en recourant à la discrimination des entreprises par des facturations différentes des exportateurs du café à l’exportation et en faisant bloquer, sous prétexte de recouvrement de des créances, leurs fonds dans les comptes bancaires, fonds destinés à acheter les produits agricoles des paysans. Pire encore, l’ONAPAC a même demandé aux exportateurs et transitaires qui refusent d’appliquer ses notes circulaires qui violent les lois régissant les secteurs d’exportation et de transit de cesser leurs activités. La lettre n° ONAPAC/002/DIRSECT/2021 du 06 janvier 2022 prouve cette démarche de l’ONAPAC contraire à la vision du chef de l’Etat et aux efforts du gouvernement.


Concernant l’allégation selon laquelle la plus haute autorité du pays aurait été induite erreur pour demander les mesures conservatoires contre les tracasseries de l’ONAPAC, cet office semble ignorer que les autorités du pays, à tous les niveaux, ont des services spécialisés pour bien s’informer ; elles ne peuvent donc pas donner des instructions sur base de rumeurs.


S’agissant des taux repris dans l’avis du Conseil d’Etat sous rite 033 du 10 février 2022, l’ASSECCAF rappelle que personne ne peut les appliquer sur les produits agricoles d’exportation, l’avis du Conseil d’Etat n’ayant pas de caractère contraignant, au regard de la loi portant organisation, compétence et fonctionnement des juridictions d’ordre administratif, qui à son article 132, stipule que : « L’avis de la section consultative ne lie pas l’autorité requérante, de même qu’il ne fait pas obstacle à toute action ultérieure contre l’acte pour cause notamment de non-conformité à la Constitution, aux traités dûment ratifiés, aux lois, aux édits et aux règlements supérieurs. »


L’arrêté interministériel de 1991 portant extension des activités de l’Office zaïrois du café ayant fixé en son temps un taux unique les frais de prestation de cet Office à 4% de la valeur FOB à titre des frais d’intervention (à ne pas confondre avec les taxe et redevance) et la lettre du ministre de l’Agriculture de 1988, étant antérieurs et contraires, sont déjà abrogés par les lois précitées et les lois relatives aux finances publiques en vigueur, de ce fait ils ne peuvent servir de base légale pour percevoir des frais et redevances sur les exportations des produits agricoles au-delà de la marge de perception autorisée par la loi.


A titre de rappel, l’article 84 de la loi agricole ci-haut citée dispose que : « Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à la présente loi ».

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