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POLITIQUE

Déclaration tapageuse de Kagame, ce que j’en pense en cinq points

1. D’entrée de jeu, on ne doit pas perdre de vue que Paul Kagame n’est pas Congolais. Il est Rwandais. Pourquoi ses propos devraient autant déranger comme si c’était un Congolais qui les avait dits. Il faut prendre ça dans le cadre de l’animosité entre ces deux voisins qui ne se supportent pas souvent. C’est à la République démocratique du Congo d’en répondre.

2. « Mon frère ». Devrait-il dire « mon ennemi » ? Non. C’est manquer de tact. Si on a un peu de connaissances en diplomatie, cette formule de courtoisie (mon frère) ne devrait pas être interprétée comme un aveu d’impuissance, au point de tiquer la majeure partie de l’opinion congolaise- même si on peut comprendre sa frustration- bien au contraire. Puisqu’on a vu des frères entrer en conflit et s’entretuer. Et très Souvent, c’est une personne tierce qui vient les séparer. En période d’escalade verbale, les uns optent pour le hard power, les autres y vont par le soft power, ça fait partie des techniques diplomatiques. C’est la fin qui justifie les moyens. Généralement, en diplomatie, on préfère  en finir avec son adversaire en douceur, en le caressant dans le sens du poil. C’est  d’ailleurs  la méthode la plus recommandée en cette matière. Celui qui gagne par la ruse est plus intelligent que celui qui le fait par la violence, jugée parfois comme arme des faibles.

3. Que doit faire la République démocratique du Congo ? Dans ce genre de situation, le pays qui se dit offensé (la RDC) exige des excuses officielles de la part du pays offenseur (Rwanda). C’est ce qu’on appelle la réparation morale. Le Rwanda est-il tenu de le faire ? Pas sûr. Mais cela ne devrait pas forcément conduire à la rupture des relations entre les deux pays. Ce serait une erreur, à ce stade des tensions, d’envisager cette voie comme certains seraient en train de la réclamer.

En cette matière, l’histoire récente des Relations Internationales est riche en exemple. En effet, cela fait  plus de 70 ans que la Chine court toujours derrière les excuses officielles  du Japon dans l’affaire massacre perpétré par son armée dans la ville de Nanjing, province chinoise du Jiangsu (en décembre 1937, bien avant le début officiel de la deuxième guerre mondiale).

Malgré le refus catégorique de différents gouvernements nippons, les deux pays sont en assez bonne relation. La Chine est actuellement l’un des partenaires économiques importants du Japon. Ils siègent dans plusieurs mécanismes de coopération régionale. Même chose entre le même Japon et la Corée du Sud (voir l’affaire des esclaves sexuels). Voir également la reconnaissance ou la négation du génocide arménien. Le sujet divise actuellement la Turquie de Recep Tayyip Erdogan

4. Pendant ce temps, si le Rwanda refuse de réparer moralement, la RDC peut, en toute logique, appuyer là où le Rwanda aura aussi mal. Il suffit d’identifier ses points névralgiques. Ainsi, la poire sera coupée en deux, en attendant le dénouement de la situation.

5. Au demeurant, il appartient à la République démocratique du Congo de travailler sur l’affirmation de sa puissance d’abord à l’interne, puis sur le plan régional. Ce ne sont pas les moyens qui lui manquent. C’est seulement dans ces conditions que certains pays seront obligés à tourner la langue sept fois avant de lancer des invectives contre elle. Le rapport de forces étant de mise en Relations Internationales

Cyprien Kapuku, journaliste et chercheur en Relations Internationales

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