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Macron giflé : l’auteur condamné à 18 mois de prison, dont 4 ferme

Le verdict est tombé. Le tribunal correctionnel de Valence a condamné, jeudi 10 juin 2021, Damien Tarel à 18 mois de prison, dont 4 ferme, avec mandat de dépôt, pour avoir giflé deux jours plus tôt le président de la République, Emmanuel Macron, lors d’un déplacement à Tain-l’Hermitage (Drôme).

Le procureur de la République de Valence avait requis 18 mois de prison pour violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité publique. L’homme de 28 ans, qui a reconnu avoir donné cette gifle au chef de l’État, lors de l’audience, a été aussitôt incarcéré. 

Cette gifle, « parfaitement inadmissible », est un « acte de violence délibérée », a soutenu le représentant du ministère public, face à l’homme de 28 ans, cheveux longs, tee-shirt vert et lunettes sur le nez, qui était jugé en comparution immédiate. Le procureur, Alex Perrin, s’est inquiété d’un possible risque de récidive, disant percevoir « une sorte de détermination froide » chez ce résident de Saint-Vallier, inconnu des services de la justice et membre d’associations « en lien avec les arts martiaux, le Moyen Âge et l’univers des manga ». « Cette décision sera observée, scrutée » et aura même « un écho médiatique international », a-t-il ajouté.

En effet, les journalistes étaient présents en masse au tribunal et les TV news, suivies par des millions de téléspectateurs, diffusaient des informations en boucle.

« Je ne me rappelais pas lui avoir tenu le bras »

Damien Tarel « ne conteste pas du tout les faits », rapporte BFMTV. Concernant  les images diffusées sur les réseaux sociaux, le Drômois de 28 ans a déclaré : « Je découvre les images en même temps que vous. » Et d’ajouter : « Dans mes souvenirs, je ne me rappelais pas lui avoir tenu le bras. » Il a également raconté : «  Dans la voiture, quand on attendait, on avait envisagé de faire quelque chose de marquant, de l’interpeller sur des sujets politiques, de prendre un gilet jaune ou un drapeau français, mais on s’est ravisés. »

L’homme a admis, lors de l’audience, avoir frappé le président d’un geste « impulsif ». « Je ne l’apprécie pas et quand il s’est dirigé directement vers moi, dans un premier temps, ça m’a surpris », a raconté celui qui s’est dit « investi par les Gilets jaunes, dont la voix n’est plus entendue ». Avant de se l’expliquer : « C’est sa campagne : il essaie de cibler la jeunesse française. » « Quand j’ai vu son regard sympathique et menteur », j’ai compris, a-t-il rapporté, qu’il « voulait faire de moi un potentiel électeur ». 

Un homme « lambda »

Sans emploi et vivant du RSA (Revenu de solidarité active, une prestation qui complète les ressources d’une personne démunie ou aux ressources faibles, afin de lui garantir un revenu minimal), Damien Tarel a reconnu des difficultés scolaires due à sa dyslexie, un bac passé en deux fois, une formation en thanatopraxie interrompue avant le diplôme national. Depuis la mort de son père ; il y a deux ans, il n’a plus retravaillé.

Dans sa plaidoirie, son avocate, Elodie Guellier, s’est émue du rôle de la presse – « ça fait 48 heures que l’entourage vit un enfer – » et a demandé au tribunal de « relativiser les faits ». « Son objectif était d’échanger avec le président », a-t-elle ajouté, reconnaissant un « geste particulièrement inadapté » venant d’un homme « lambda » « qui n’a jamais frappé quelqu’un ». « Je pense qu’il a pris conscience de la gravité des faits. »

Pourquoi « montjoie, Saint-Denis ? »

À la question de la présidente du tribunal de savoir si son geste avait un lien avec la chevalerie, il a répondu : « Si on reste dans la réalité, j’ai juste giflé Emmanuel Macron car un sentiment d’injustice m’a parcouru. Cela n’a rien à voir avec la chevalerie ou mes activités personnelles ».

Damien Tarel a reconnu son ancrage  à la droite du spectre politique. Selon lui, « Macron représente très bien la déchéance de notre pays », a-t-il lancé. Passionné par le Moyen Âge, il a également confié : « Au niveau de la chevalerie, on n’aime pas le mensonge. » Quant à son cri « Montjoie, Saint-Denis », il l’explique ainsi : « ça fait référence au cri de ralliement des chevaliers, c’est un slogan patriote […] La chevalerie est une voix. Je doute que si j’avais convoqué Emmanuel Macron à un duel à l’épée au lever du soleil, il aurait répondu. » Si « Montjoie »signifie « allons-y » d’après lui, « macronie » fait référence à la politique nationale d’Emmanuel Macron. Pour rappel, l’homme avait scandé « À bas la macronie », lors du bain de foule.

Fan d’histoire médiévale

Selon les éléments de l’enquête, Damien Tarel est un fan d’histoire médiévale qui suit l’extrême droite royaliste sur les réseaux sociaux, mais que l’on décrit comme apolitique et non violent dans sa commune. Il a fondé à Saint-Vallier (Drôme), son lieu de résidence, deux associations dans les arts martiaux historiques européens – une pratique de combats « tombés dans l’oubli » qui compte 1500 pratiquants en France – et les jeux de plateau à figurines.

Sur YouTube, il est abonné à plusieurs chaînes d’extrême droite, comme celle d’Henry Lesquen, condamné en 2018 pour provocation à la haine et contestation de crime contre l’humanité ; ou royaliste comme celle du Cercle Richelieu. Sa page Facebook indique qu’il « aime » celle du groupe Action française Lyon, parmi d’autres des mêmes mouvances.

Emmanuel macron relativise

Emmanuel Macron, qui n’était pas présent au procès, a donné dans le même temps une interview à BFMTV. Le chef de l’État est revenu sur cet épisode, en relativisant les faits. En effet, le locataire de l’Élysée estime que le pays n’est pas dans une situation de tension comme pendant la crise des Gilets jaunes et a préféré insister sur l’ambiance d’ « optimisme »qu’il sent en France.

« Ne faisons pas dire à cet acte imbécile et violent [la gifle] plus qu’il ne faut lui en faire dire », selon lui. « Il faut relativiser et ne rien banaliser […] ce n’est pas grave de recevoir une gifle quand on va vers une foule », a-t-il ajouté.

Emmanuel Macron a refusé de se prononcer sur la comparution immédiate, jeudi, de son gifleur. Pour le président de la République, « la vraie violence, ce n’est pas ça », mais plutôt celle subie par « les femmes qui meurent sous les coups de leur compagnon et de leur mari », car « il y a encore trop de féminicides contre lesquels nous nous battons avec force », ou par les maires qui « sont agressés ».

Il sied de noter que pour un geste qui constitue une atteinte intolérable à l’institution (Président de la République), Damien Tarel a été également condamné à trois ans de privation de droits civiques, cinq ans d’interdiction de détention d’armes (des armes de reproduction ont été découvertes chez lui), interdiction d’exercer toute fonction publique à vie et il devra se soumettre à un suivi psychologique. Ce dernier pouvait demander un renvoi pour mieux préparer sa défense mais a réclamé à être jugé « immédiatement ». Une peine sévère méritée.

Robert Kongo, correspondant en France

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